faute originelle: et l'homme créa le péché de chair.

au commencement était le doute. puis, de manière plus ou moins subtile, il fut détourné en désir condamné et débauche. comment le péché originel est il devenu sexuel?
[...]
"tu ne mangeras pas de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, car du jour où tu en mangeras, tu deviendras passible de mort." (genèse 2-17)

ni le mot "péché" ni la notion ne figurent dans les récits de genèse 2-3, ni même dans l'ensemble de la bible. [...] le mot de "péché" n'apparaît guère dans ces récits, mais dans le suivant, celui du meurtre d'abel par caïn (genèse 4-7). pour la bible, la vraie faute originèlle de l'humanité est d'avoir attenté à la vie du frère, même si, au cours de l'histoire de l'occident, ce crime a fait couler beaucoup moins d'encre que celui d'adam.

enfin, dans les textes de la genèse 2-3, il n'est nullement question de sexualité : le couple ne s'unit qu'au début du chapitre 4. l'ambition du chapitre 2 est ailleurs: elle est de décrire la création par dieu d'un être humain, d'énoncer l'interdit, puis de raconter la création du couple différencié, homme et femme. celle du chapitre 3, marqué par l'irruption du serpent rusé, est de montrer comment ce dernier va déformer l'interdit qui portait sur un seul arbre en une potentielle et insupportable privation de "tous" les arbres. le couple succombe à la suspicion et à la concupiscence ; il mange du fruit de l'arbre. défaut de confiance en un dieu qui, pourtant, faisait confiance... mais selon l'esprit du livre de la genèse, adam a plus désobéi que péché.

[...] 4 siècle plus tard surgit le terme de "péché originel" dans le propos d'augustin [...] il affirme que ceux ci (les petits enfants) sont baptisés en vue de la rémission de leurs péchés "à cause du péché originel", même s'ils n'ont pas eut le temps de pécher. par ailleurs augustin ferraillait contre le moine pélage qui prétendait que l'être humain peut, par ses mérites, gagner son ciel. non rétorque augustain, seule la grâce divine sauve une nature humaine indéfectiblement marquée par le péché : c'est le péché "originel".
dans sa démonstration, augustin s'appuie sur l'apôtre paul qui, voulant opposer adam et le christ, avait insisté sur la faute d'adam. malheureusment, le verset central du développement de paul (romains 5-12), fort obscur, a pu donner à penser que la faute d'adam n'était pas celle de l'humanité en général, mais celle des premiers parents- fuate historique qui enfermait toute l'humanité à venir dans une sorte de fatum grec, de destin implacable.
augustin, même s'il ne l'a pas formellement dit, a fait une interprétation historicisante du péché originel. puisque les parents ont péché, la suite des générations le contracte. mais, cerise sur le gâteau, augustion explique que le genre humain a été infecté par la "génération" de nouveaux êtres humains. le mot de sexualité n'est pas employé, mais c'est elle qui est visée. plus tard, au XVIè siècle, une fois que luther eut fait d'adam le modèle de la concupiscence, donc de l'envie, du désir dévoyé, l'aspect sexuel de l'affaire se renforça.
cette dérive plus populaire que théologique, prise dans un climat ambiant de discrédit du corps et de condamnation du sexe, finit par être la manière courante de comprendre ce fameux péché. voilà comment "croquer le fruit défendu", c'est à dire "ne pas faire confiance à la parole de dieu", devint "commettre le péché de chair". contresens manifeste, crime envers l'être humain créé bon -sexualité comprise- injure faite à dieu, mais aussi détournement utile qui évitait d'enquêter sur d'autres crimes telle la violence envers le frère.

[...] ainsi, culpabilité oblige, les croyants devinrent les acteurs de leur propre destruction. existe il crime plus parfait que celui que chacun, à son insu, a exercé contre lui même? 
[...] pourtant l'église catholique qui a hérigé le péché originel en dogme (concile de trente en 1546, qui reprend le concile de czarthage de 418) n'a pas renoncé à son interprétation historicisante (catéchisme de l'église catholique  §386-421,1993), même si elle souligne le côté "analogique" du récit biblique. 

passage tiré du dossier sexe et violence dans la bible du magazine "le monde des religions"n°66 http://www.lemondedesreligions.fr/mensuel/2014/66/index.php?contexte=p