Passages du livre Marilyn Monroe, confession inachevée:
Je savais à quel point j'étais médiocre. Mon manque de talent, j'avais l'impression de le porter comme une robe bon marché. Mais, mon Dieu, comme je voulais apprendre! Me transformer, m'améliorer! je ne désirais rien d'autre. Ni hommes, ni argent, ni amour, mais la possibilité de jouer la comédie. Avec les projecteurs et la caméra braqués sur moi, je me voyais soudain telle que j'étais. Si maladroite, si vide, si inculte! Une orpheline morose avec une cervelle comme un petit pois!
Mais j'allais changer. Immobile et silencieuse, je regardais de tous mes yeux. ... J'avais un nouveau nom, Marilyn Monroe. Il me fallait renaître sous ce nom. Et mieux réussir cette naissance que la première fois.
...
elle me guida dans mes lectures. Je lus Tolstoï et Tourgueniev. Ces deux auteurs me passionnèrent... Mais je n'avais pas l'impression pour autant d'enrichir mon esprit.
Oui il y avait quelque chose de spécial chez moi, et je savais ce que c'était. J'étais le genre de filles qu'on retrouve morte dans une chambre minable, un flacon de somnifères vide à la main.
Quand on est jeune et bien portant, on peut être résolu au suicide le lundi, et retrouver toute sa gaieté le mercredi.
Un homme était en train d'escalader la fenêtre de ma chambre. Je pris une grosse voix d'homme et lançai d'un ton indigné:
- Dites donc, qu'est ce que vous faites là?
L'homme ressortit la tête pour regarder dans ma direction.
- Allez vous en, criai-je, toujours de ma grosse voix, sinon j'appelle la police.
L'homme se mit à marcher vers moi. Tournant les talons, je pris mes jambes à mon coup.
Il était prêt de minuit. Pieds nus, avec une de ces chemises de nuit très succinctes, alors à la mode, qui m'arrivait juste en dessous de la taille, je courrais dans la rue totalement déserte.
... Ce n'est pas un cambrioleur, poursuivit l'inspecteur d'un ton sévère. Il connaît votre nom et votre adresse. Il revient après que vous l'avez chassé. De toute évidence il ...
L'autre policier, qui était en train de fouiller mon visiteur, lui sortit un pistolet de la poche.
-Hé, fit-il, coupant la parole à l'autre, c'est un 38 de service!Où vous avez pris ça?
A l'expression "38 de service" je compris qui était mon visiteur. C'était le policier aux yeux trop rapprochés qui m'avait aidée à toucher mon chèque ... Il s'était souvenu de mon nom et de l'adresse que j'avais inscrits au dos du chèque.
... Je racontais mon histoire aux inspecteurs. L'autre voulu nier mais les policiers trouvèrent sur lui une carte de police... ils l’emmenèrent.
Le lendemain, les inspecteurs revinrent me voir. Ils m'expliquèrent que le flic en question était nouveau dans le métier, qu'il était marié et qu'il avait un bébé de quatorze mois. Ils me sauraient gré, me dirent ils, de ne pas porter plainte contre lui, ce qui aurait été fâcheux pour la réputation de la police.
Le sexe est une chose bien déroutante quand il vous laisse de glace. Quand je me réveillais le matin,après mon premier mariage, je me demandais si le monde entier était fou, à faire en permanence un tel battage autour du sexe. C'était un peu pour moi comme si j'avais entendu vanter du matin au soir les mérites incommensurables de la poudre à récurer.
... Ensuite, quand je me mis à lire, je tombai sur des mots comme "frigide","marginale" et lesbienne". Je me demandai alors si je n'étais pas les trois à la fois.
Un homme qui m'avait embrassée une fois m'avait dit qu'il était bien possible que je sois lesbienne parce que apparemment le contact des hommes-en l’occurrence, le sien-ne provoquait chez moi aucune réaction. ... Sans compter cette tendance inquiétante chez moi à toujours éprouver du plaisir en regardant une femme bien faite.
Maintenant que j'étais amoureuse, je savais qui j'étais. Pas lesbienne, en tout cas. Quant au monde, il n'était pas fou d'être à ce point excité par le sexe. En vérité, il ne l'était pas assez.
La gentillesse est la plus étrange qualité que l'on puisse trouver chez un aman-,ou chez n'importe qui.
Je restais à la maison, prenais des courts d'art dramatique, lisais des livres.
Un, surtout, m'emballa plus que tout ce que j'avais lu jusqu'alors : l'autobiographie de Lincoln Steffens. C'était pour moi le premier livre qui semblait dire la vérité sur les gens et sur la vie. Un livre plein d'amertume, mais de force qui ne se faisait pas simplement l'écho de toutes les fables dont j'avais toujours eu les oreilles rebattues, selon lesquelles les gens s'aimaient les uns les autres, la justice triomphait en toutes circonstances et les gens importants de la nation agissaient toujours au mieux des intérêts de leur pays. Lincoln Steffens savait tout sur l'injustice et sur les pauvres gens. Il connaissait les mensonges dont se sevraient certains pour se pousser en avant, connaissait l'arrogance des riches. C'était à croire qu'il avait eu une existence aussi dure que la mienne. J'adorais son livre. Pendant que je le lisais, j'oubliais que je n'avais pas de travail et que je n'étais pas "photogénique".
...
-A votre place, dit-il à mi-voix, je n'irais pas clamer mon admiration pour Lincoln Steffens. Ca ne peut que vous attirer des embêtements. On va raconte partout que vous êtes une rouge.
-Une rouge? M'étonnais-je.
-Une révolutionnaire, précisa M. Mankiewics. Ne me dites pas que vous n'avez jamais entendu parler des communistes?
-Pas beaucoup, dis-je.
-Vous ne lisez pas les journaux?
-Je saute ce qui m'ennuie.
...
Je n'arrivais pas à croire qu'on puisse s'en prendre à moi parce que j'admirais Lincoln Steffens. Le seul autre personnage politique que j'avais jamais admiré, c'était Abraham Lincoln. J'avais lu tout ce que j'avais pu trouver sur lui. C'était à mes yeux le seul Américain célèbre qui me ressemblait un peu, du moins dans son enfance.
Quelques jours plus tard, le service de publicité me demanda d'établir une liste des 10 plus grands hommes du monde. J'inscrivis en tête le nom de Lincoln Steffens et le type du service de publicité secoua la tête.
-Il va falloir rayer celui-là,dit-il. NOus ne voulons pas qu'on enquête sur Marilyn.
Je compris alors ... Je ne parlais donc plus jamais de lui, à personne... mais je continuai à lire le deuxième volume en secret et planquai les deux volumes sous mon lit ... ma première action clandestine.
Jamais un homme aux dents trop bien rangées ne m'a attirée. En vérité, les sourires de publicité pour dentifrice m'ont toujours déplu
J'avais rêvé toute ma vie d'avoir de l'argent, mais le million de dollars que J.H. m'offrait maintenant ne représentait rien pour moi.
-Je ne te quitterai pas, lui répondais-je. Et je ne te trahirai jamais. Mais je ne peux pas t'épouser, Johnny. Parce que tu vas guérir. Et plus tard, un jour ou l'autre, je risque de tomber amoureuse. ...
-Je ne guérirai pas et je veux que ma fortune te revienne quand je ne serai plus là.
Mais je ne pouvais pas dire oui. ... Il voulait être sûre que jamais plus de ma vie je ne connaîtrais la faim et la pauvreté.
... Joe Schenck a essayé de me convaincre.
-Qu'est ce que tu as a perdre?...
-Moi-même. Je ne me marierai que pour une personne que pour une seule raison-l'amour.
Il m'a demandé:
-Qui préfèrerais-tu épouser- un garçon pauvre que tu aimes ou un homme riche qui ne te déplaît pas?
-Un garçon pauvre que j'aime ais-je répondu.
-Tu me déçois, a-t-il rétorqué. Je te croyais plus fine mouche.
... Après sa mort ... je n'ai jamais regretté le million que j'avais refusé. Mais je n'ai jamais cessé de regretter ...,le meilleur homme du monde.
Les soirées hollywoodiennes non seulement me déconcertent, mais encore me déçoivent bien souvent. Et ma déception se précise par exemple lorsque je fais la connaissance d'une vedette que j'admirais depuis mon enfance. ... Je me suis souvent ainsi tenue silencieuse durant des heures au cours d'une réception à regarder mes idoles de l'écran se transformer sous mes yeux en fantoches sans envergure.
Les grands manitous des studios sont très jaloux de leurs prérogatives. Tout comme ceux de la politique, ils aiment choisir leurs propres candidats à la renommée. Ils n'aiment pas que le public s'en mêle et leur colle sur les bras une créature de leur choix en déclarant : "c'est elle qu'on veut."